Le divorce pour faute est l’une des formes les plus anciennes du divorce en France. Bien qu’il soit moins fréquent aujourd’hui que le divorce par consentement mutuel ou le divorce accepté, il conserve une importance particulière lorsqu’un conjoint estime que la rupture est directement liée au comportement fautif de l’autre. Ce type de procédure repose sur la notion de manquement grave aux obligations du mariage, rendant la vie commune intolérable.
Qu’est-ce qu’un divorce pour faute ?
Le divorce pour faute est prévu par l’article 242 du Code civil. Il implique que l’un des époux reproche à l’autre un comportement constituant une violation grave ou répétée des devoirs du mariage : devoir de fidélité, devoir de respect, devoir d’assistance, contribution aux charges du ménage, etc.
Dans cette procédure, le juge doit être convaincu que la faute reprochée est bien la cause de l’échec du mariage. Le simple conflit conjugal ou les différends liés au quotidien ne suffisent pas : il faut démontrer une faute avérée et sérieuse. Contrairement à d’autres formes de divorce, ici la dimension accusatoire est centrale, ce qui peut rendre la procédure plus émotionnelle et plus complexe.
Les fautes pouvant justifier un divorce pour faute
Certaines fautes reviennent régulièrement dans les dossiers de divorce pour faute, car elles ont été reconnues par la jurisprudence comme suffisamment graves. On distingue notamment :
La violation du devoir de fidélité
L’adultère est l’une des fautes les plus fréquemment invoquées. S’il n’est plus automatiquement considéré comme une faute grave, il peut le devenir lorsqu’il cause une atteinte insupportable à l’équilibre du couple ou est commis dans des conditions humiliantes.
Les violences conjugales
Les violences physiques ou psychologiques constituent une cause majeure de divorce pour faute. Elles peuvent être prouvées par des certificats médicaux, des plaintes, des témoignages ou des attestations.
L’abandon du domicile
Quitter le domicile conjugal sans motif valable peut être considéré comme une faute, surtout si cela laisse l’autre conjoint dans une situation de détresse financière ou familiale.
Le manque de respect ou les injures graves
Les insultes, le harcèlement moral ou le dénigrement répété relèvent également de la faute et peuvent justifier un divorce pour faute.
Le non-respect des obligations financières
Refuser de contribuer aux charges du ménage ou dilapider les finances du couple constitue un motif fréquent.
Ces fautes doivent être prouvées par celui qui les invoque. Cette exigence de preuve est l’un des éléments clés de la procédure.
La procédure du divorce pour faute : un parcours exigeant
La procédure de divorce pour faute suit plusieurs étapes, souvent plus longues et plus délicates qu’un divorce amiable. Voici le déroulement général :
La demande en divorce
L’époux à l’origine de la démarche dépose une requête auprès du juge aux affaires familiales. Cette requête ne mentionne pas encore les fautes : elle ouvre simplement la procédure.
L’audience d’orientation et de mesures provisoires
Le juge organise une audience afin de décider des mesures applicables durant la procédure : logement, pension alimentaire, garde des enfants, gestion des dépenses, etc.
L’assignation avec mention des fautes
C’est à cette étape que les fautes sont exposées en détail. L’époux demandeur doit expliquer en quoi les comportements reprochés justifient un divorce pour faute.
La phase de preuves
Attestations, messages, certificats, relevés bancaires, plaintes… les preuves doivent être solides et admissibles. Le juge appréciera leur crédibilité et leur pertinence.
Le jugement de divorce
Le juge se prononce enfin : il peut prononcer le divorce pour faute, refuser de le prononcer, ou encore prononcer un divorce aux torts partagés si les deux époux ont commis des fautes.
Ce processus peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années pour les situations les plus conflictuelles.
Les conséquences du divorce pour faute
Le type de divorce retenu peut influencer certaines décisions du juge, notamment :
Les dommages et intérêts
Le conjoint victime de la faute peut demander une indemnisation si le comportement de l’autre lui a causé un préjudice moral ou matériel important.
L’autorité parentale et la résidence des enfants
Même si la faute concerne la relation conjugale, elle peut peser dans l’évaluation de l’intérêt de l’enfant. Par exemple, des violences ou une addiction peuvent entraîner des modalités de garde plus restrictives.
La prestation compensatoire
Le fait d’être déclaré fautif n’entraîne pas automatiquement la perte de la prestation compensatoire, mais cela peut influencer l’appréciation du juge dans certains cas.
Le divorce pour faute étant plus conflictuel, il peut avoir un impact émotionnel et psychologique important pour les deux époux.
Divorce pour faute ou divorce amiable : comment choisir ?
Aujourd’hui, de nombreux couples privilégient le divorce par consentement mutuel ou les procédures plus pacifiées. Ces solutions ont l’avantage d’être plus rapides, moins coûteuses et moins éprouvantes.
Cependant, le divorce pour faute reste pertinent dans plusieurs situations :
lorsque l’un des époux a subi un comportement grave et souhaite une reconnaissance judiciaire ;
lorsqu’il existe un rapport de force ou un danger (violence, harcèlement) ;
lorsque les faits sont trop graves pour envisager une procédure amiable.
Il est donc essentiel de bien évaluer la situation, avec l’aide d’un avocat spécialisé, afin d’opter pour la procédure la plus adaptée.
Conclusion : un divorce qui met en lumière les responsabilités
Le divorce pour faute n’est pas qu’un simple constat d’échec conjugal : c’est une démarche juridique visant à établir la responsabilité d’un époux dans la rupture du mariage. S’il est plus lourd et plus conflictuel qu’un divorce amiable, il demeure indispensable dans certaines situations où la justice doit reconnaître et sanctionner des comportements fautifs.
Comprendre ses enjeux, ses preuves et ses conséquences permet d’aborder ce type de divorce avec lucidité et préparation, afin de défendre au mieux ses droits.




